L’action en justice du CHSCT

Un récent arrêt de la chambre sociale en date du 21 novembre 2012(n° 10-27452, GDF Suez, D) nous donne l’occasion de revenir sur l’action en justice du CHSCT. Non prévue par les textes, la personnalité civile du CHSCT a été reconnue par un arrêt de la chambre sociale du 17 avril 1991 (n° 89-17993, Sollac P). De cette reconnaissance découle de jure (de droit) la possibilité pour cette instance d’ester en justice. L’objet (1.) et la forme (2.) de l’action en justice seront successivement étudié.

L’objet de l’action en justice

Défense d’un intérêt personnel En vertu de l’article 31 du Code de procédure civile, le CHSCT peut obtenir réparation d’un préjudice d’ordre patrimonial ou extra-patrimonial. Par conséquent, le CHSCT peut agir en justice lorsque ses intérêts ont été lésés. Il peut ainsi obtenir la condamnation de l’employeur en présence d’une entrave à son fonctionnement (crim.12 avril 2005, n° 04-83101, Sollac Fos P) ou obtenir des juges que ce dernier exécute les engagements pris lors d’une réunion plénière (TGI Paris, 30 mars 2004, SNCF). Défense d’un intérêt collectif En droit procédural, l’adage « Nul ne plaide par procureur » prévaut. Il faut donc prouver l’existence d’un préjudice certain, personnel et ayant un lien direct avec les infractions commises ou les manquements contractuels ou extracontractuels (articles 2 CPP, 1147 et 1382 du Code civil). Par exception, la loi a reconnu aux syndicats la possibilité d’agir au nom des salariés dans le cadre de la défense de l’intérêt collectif. Cette faculté n’a pas été reconnue aux CHSCT. C’est pourquoi, l’action de cette instance est irrecevable lorsqu’elle vise des infractions commises à l’égard de tiers (crim. 11 octobre 2005, n° 05-82414, Air France, P).

La forme de l’action en justice

La représentation du CHSCT A l’instar des règles entourant l’action en justice du CE, une délégation expresse de la part de la majorité des élus du CHSCT est nécessaire pour donner pouvoir à la personne désignée de représenter valablement le CHSCT en justice (soc. 7 décembre 2004, n° 02-19076, Pneumatiques Kléber, D). De facto, le mandat permanent de représentation conféré au secrétaire du CHSCT ne l’autorise pas de représenter automatiquement le comité en justice. Seul un mandat exprès le permet. En l’absence d’un tel mandat, la saisine n’est pas valable. Il faut donc être très attentif sur ce point car les conséquences sont assez lourdes. Dans le récent arrêt du 21 novembre 2012 (n° 10- 27452, GDF Suez, D) évoqué lors de l’introduction, la Cour de cassation rappelle que « toutes les décisions du CHSCT doivent être prises à l'issue d'une délibération collective ». En conséquence, le mandat délivré à la personne, qui ira représenter le CHSCT en justice, se matérialise à travers un vote à la majorité des élus. Ainsi, « le mandat de représentation donné au secrétaire du CHSCT résultait d'une simple lettre signée des membres élus de cette institution remise à son président » est irrégulier. Plus prosaïquement, il faut donc en premier lieu voter sur l’action en justice en tant que telle et, en second lieu, pour le représentant du CHSCT. La question des frais de justice Sauf abus, c’est à l’employeur de supporter les frais de justice ainsi que les coûts de l’expertise (soc.12 janvier 1999, n° 97-12794, EDF, P). A partir du moment où aucun abus n’est démontré, l’employeur doit rembourser les frais de procédure même si l’action du CHSCT a été déclaré irrecevable par le juge (soc. 2 décembre 2009, n° 08-18409, Air France, P+B ). Il en va de même lorsque le CHSCT est débouté (soc. 10 mai 2012, EDF, n° 10-24870, D). Cette jurisprudence se justifie par la lettre de l’article L. 4614-9 du Code du travail : « Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail reçoit de l'employeur les informations qui lui sont nécessaires pour l'exercice de ses missions, ainsi que les moyens nécessaires à la préparation et à l'organisation des réunions et aux déplacements imposés par les enquêtes ou inspections ». Dans un arrêt du 25 juin 2002 (n° 00-13375, EDF, P), la Cour de cassation justifie sa position à l’aune de l’absence du budget du CHSCT et donc, le cas échéant, de moyens financiers. Naturellement, l’employeur peut contester le montant des honoraires. C’est pourquoi, le CHSCT doit s’attacher à transmettre la note d’honoraires à l’employeur. En outre, si la somme est excessive, le juge est habilité à réduire la prise en charge de l’employeur à une somme raisonnable.

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